Ordre et désordre à l’époque moderne : policer les minorités en France et en Europe

Séminaire de Master 1 et 2 animé par Vincent Denis (université Paris 1 Panthéon-Sorbonne).

Séminaire « Outils de la Recherche » de Master 1 (S1-S2), 2023-2024 dans le cadre de la spécialité moderne du master « Histoire et anthropologie des sociétés médiévales et modernes ».

Un mardi sur deux, de 11 h à 13 h

Salle Robert Fossier (esc. C, 3e étage, Sorbonne)
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
17 rue de la Sorbonne, Paris 5e

Protestants ou catholiques, tziganes, juifs, musulmans, esclaves, « étrangers », « Noirs »… : loin d’être monolithiques, les sociétés européennes de l’époque moderne abritaient en leur sein des groupes et des individus très divers, caractérisés par une altérité marquée, qu’elle soit religieuse, ethnique, linguistique ou raciale. Le séminaire invite à revisiter l’histoire de ces sociétés en s’intéressant à leurs marges et aux contraintes qu’elles faisaient peser sur ces groupes dominés. Au-delà des incapacités juridiques, il s’agit de s’interroger sur les formes d’exclusion, de contrôle et de régulation qui pouvaient s’appliquer à ces populations dans leurs différentes dimensions, qu’elles touchent aux unions, à l’habitat, à l’exercice d’un culte et à l’orthodoxie religieuse, à l’usage de la langue, aux activités économiques et à la vie dans la cité. On envisagera aussi les formes de protection dont elles pouvaient jouir contre d’autres communautés. Des travaux récents invitent à ne pas réduire la condition des dominés à l’exclusion face à une supposée « majorité » pourvue de droits. Les sociétés d’Ancien Régime sont des « ensembles inextricable d’inégaux », sans se soucier d’inventorier de manière exhaustive leurs membres. En interrogeant les relations de ces minorités aux autorités politiques à différentes échelles, c’est aussi une autre histoire de l’État moderne qui se dessine, celui-ci se construisant « par en bas ». Des paix de religion à la tolérance supposée du siècle des Lumières, de la confessionnalisation à la formation des ghettos, on voudrait confronter l’histoire des théories politiques à la réalité des pratiques sociales et du fonctionnement des institutions, en envisageant comment les sociétés européennes ont appréhendé l’altérité.

Le séminaire entend familiariser aux outils de l’histoire sociale et politique en abordant un vaste domaine : celui des tensions, des conflits et des révoltes qui déchirent sociétés et États, des conceptualisations du gouvernement, de l’ordre et des dispositifs pénaux et coercitifs, dans le premier âge de l’État moderne, du xvi^e siècle aux bouleversements de la Révolution française et du premier xix^e siècle.