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2 - Sites et pouvoirs

On se propose de travailler avec la notion de social site (James C. Scott) en mettant l’accent non pas sur les savoirs, leurs formes et leurs contenus mais sur les logiques d’acteur qui les sous-tendent et les dynamiques sociales qui en résultent. Le laboratoire et la place marchande ou financière, les dictionnaires ou les collections constituent quelques-uns de ces lieux dont le projet vise à croiser l’étude. En histoire des sciences, où cette approche a suscité déjà de nombreux travaux, il s’est agi d’abord de comprendre comment des savoirs situés peuvent devenir aussi des savoirs universels. Un tel processus, à la fois épistémique et social, exige de prendre en compte non seulement les producteurs de savoirs mais aussi les dispositifs publics de légitimation. L’organisation publique des sciences à Paris entre 1750 et 1850 permet d’étudier, sur un cas exceptionnellement riche, comment la construction d’un espace de diffusion et de réception, allant jusqu’à un large public non spécialisé, a pu représenter pour le travail scientifique un élément essentiel de légitimation s’inscrivant directement dans les stratégies de recherche (B. BELHOSTE), avec en contrepoint les études menées sur les allocations de recherche attribuées par la Caisse nationale des sciences dans les années 1930 (M. SONNET) et sur un laboratoire de chimie et de bio-chimie au cours du second XXe siècle (M. LE ROUX).

L’analyse des transformations institutionnelles et sociales de l’espace savant entre le XVIIIe et le XIXe siècle passe également par une étude du rôle joué par les différents savoirs dans les entreprises de normalisation sociale et de (re)construction politique. Les demandes de pension adressées à l’administration ou les dictionnaires destinés à un large public peuvent ainsi contribuer à la fabrication de nouvelles catégories de lecture du monde social et politique et participer à la diffusion ou la contestation de formes de domination (J.-L. CHAPPEY, J. VINCENT).

La masse documentaire disponible par l’imprimé est finalement à l’origine d’une mutation radicale des collections de livres, alias des bibliothèques.Entre l’époque moderne et l’époque contemporaine, celles-ci sont complètement réorganisées et réaménagées (avec un mobilier nouveau), classées selon des critères modernes et, très progressivement, administrées selon les logiques de la rationalité politique. On sait comment les bibliothèques deviennent un élément important de la gloire du prince et de ses États, mais on mesure moins leur rôle sur le plan plus strictement économique : dès lors que le livre devient une « marchandise », son contenu est affecté d’une valeur (texte, mais aussi images) et par suite, la proximité des auteurs, des éditeurs scientifiques ou encore des illustrateurs, et la disponibilité de riches sources documentaires, s’imposent comme des éléments essentiels dans la géographie de la librairie et du savoir. En somme, la prééminence de la matière grise et du software que l’on nous présente comme une caractéristique propre à l’âge de l’informatique (l’économie de l’immatériel) est, en réalité, fondée par la « première révolution du livre » et par la construction qui en découle, d’un marché moderne du livre. Dans cette perspective, le rôle essentiel des « gisements documentaires » deviendra un objet important pour les chercheurs du futur IHMC. Le séminaire de F. BARBIER (IHMC), titulaire de la chaire d’Histoire et de Civilisation du livre à l’EPHE, constitue de ce point de vue un pôle structurant pour les chercheurs du futur IHMC.

Publié le 25 juillet 2013, mis a jour le vendredi 26 juillet 2013

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